Le premier à pâtir de cette décision et qui risque de mettre la clé sous la porte est la société privée Eepad.
Selon des sources sûres, l’opérateur historique Algérie Télécom a pris la décision de résilier l’abonnement d’accès à Internet à ce provider, d’ici à samedi, si ce provider n’honore pas ses redevances. Une créance faramineuse que l’Eepad n’a pas payée à ce jour et qui risque de lui porter un coup fatal, voire même un dépôt de bilan.
Une situation qui peut mettre dans le désarroi l’importante clientèle abonnée à l’Eepad qui se verra du jour au lendemain déconnectée du monde virtuel que lui offre la toile du web. Toujours selon nos sources, la décision prise par Algérie Télécom de ne plus fournir d’accès à Internet à l’Eepad est dictée par le fait que ce dernier n’a pas respecté le calendrier de payement qui lui a été établi, causant un manque à gagner important à l’opérateur historique. Toutefois, la question qui se pose est de savoir comment le provider privé, l’Eepad, considéré comme précurseur dans ce domaine, est arrivé à une telle situation.
Nombre de spécialistes ont dénoncé, auparavant, la décision de réduction de moitié des prix d’accès à l’Internet au profit du grand public, même si, par ailleurs, cette dernière a été justifiée par la volonté des pouvoirs publics de permettre à des milliers de citoyens de se connecter à la toile à moindre coût. Ce qui s’apparente beaucoup plus à un «socialisme numérique», dans la mesure que les ISP ne peuvent pas, financièrement parlant, procéder à un tel rabais de coûts étant donné que Algérie Télécom n’a pas répercuté cette réduction aux providers. Lors de l’annonce de cette «décision révolutionnaire» en grande pompe, le P-DG de l’Eepad, M. Harzallah, a tiré la sonnette d’alarme en affirmant à la presse qu’il n’y avait pas eu de concertation sur la question autour de l’ARPT, l’Autorité de régulation, relevant au passage que les fournisseurs d’accès à Internet (ISP) étaient les premiers à souffrir de cette baisse drastique et brutale des prix. «La baisse de 50% des coûts d’accès à Internet a atteint les ISP et entraîné des difficultés financières pour ces sociétés», a-t-il affirmé. Une décision, qu’il faut souligner, ne profite qu’à la filiale d’Algérie Télécom qu’est Djaweb. Dans le même sillage, des spécialistes des NTIC parlent de dumping et de concurrence déloyale en mettant en avant la violation du décret exécutif 02-141 du 16 avril 2002, fixant les règles applicables par les opérateurs de réseaux publics de télécommunications pour la tarification des services fournis au public, lequel décret stipule que «les pratiques tarifaires anticoncurrentielles sont proscrites».
Encore, selon le benchmarketing international, dans l’industrie du haut débit, les marges brutes d’exploitation (EBIDTA) seraient de l’ordre de 45% et prenant en considération les coûts d’acquisition des seuls inputs récurrents des services d’Internet, alors que les prix affichés par la filiale d’Algérie Télécom sont inférieurs aux prix de revient.
La zone de turbulence que traverse l’Eepad augure-t-elle d’un lendemain incertain pour les ISP qui se sont échinés à ancrer les NTIC en Algerie ? S’achemine-t-on vers une désarticulation du secteur des NTIC qui va nous renvoyer à la case de départ ?
En effet, les opérateurs multimédias algériens ont déployé des investissements colossaux pour contribuer à faire bénéficier l’Algérie des évolutions techniques pour que l’accès à l’information et à la communication dans notre pays soit une réalité tangible.
Cet effort, supporté par un discours politique volontaire, est néanmoins annihilé par un marché dérégulé par des décisions qui portent plus atteinte à ce secteur qu’elles le développent.
article tiré du quotidien:la nouvelle republique du 14 mai 2009